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1. Contexte et Introduction

Country Overview of Algérie

1. Contexte et Introduction

1. Contexte et Introduction

Après avoir subi 132 années de colonisation française appuyée par une politique culturelle coloniale façonnée au plus haut niveau de l’Etat[1], l’Algérie a œuvré, dès son indépendance en 1962, à retrouver et valoriser les fondements de son identité culturelle. Parmi les chantiers engagés, celui de la restructuration du secteur culturel revêtait un caractère particulièrement important.

Après une première période qui s’est étendue de 1962 à 1989 et pendant laquelle le secteur culturel a été géré selon le modèle socialiste, voire soviétique (l’Etat définissait, d’une façon exclusive, les moyens et les objectifs de la culture), le secteur culturel a été abandonné pendant la guerre civile, entre 1990 et 2000, après que l’Etat s’est désengagé du secteur. S’en est suivi la période allant de 2000 à nos jours, où l’Etat, reprenant des forces, est revenu plus fort que jamais pour instaurer une stratégie culturelle hégémonique. Cette stratégie lui a permis, en à peine 10 ans, de contrôler le secteur dans son ensemble pour devenir à la fois le seul régulateur et le seul entrepreneur. En effet, depuis l’élection du Président Abdelaziz Bouteflika pour un premier mandat en 1999, puis la nomination de l’ex ministre de la Culture Khalida Toumi en 2002, le secteur culturel a été profondément restructuré pour permettre à l’Etat d’exercer un contrôle sans commune mesure sur la culture en Algérie.

De seulement 64 millions de dollars en 2003, le budget de la culture est passé à 314 millions de dollars en 2014 (voir section 3.8). Cette évolution spectaculaire est due à la manne financière des rentes pétrolières et gazières dont le pays a bénéficié dès le début des années 2000. Pris dans son ensemble, le secteur culturel a bénéficié d’environ 2,8 milliards de dollars entre 2003 et 2014. Cette manne financière aidant, le ministère de la Culture, organisation publique de l’Etat en charge de la mise en œuvre de la stratégie du gouvernement en matière de culture, a engagé une entreprise forte de législation et de réglementation culturelle qui a indélébilement transformé le secteur culturel : de seulement 9 textes publiés en 2002, le nombre des textes législatifs et réglementaires est passé à 76 en 2012. Au total, plus de 548 textes fondamentaux relatifs au secteur culturel ont été publiés entre 2002 et 2012[2].

Après 12 ans passés à la tête du ministère de la Culture, l’ex ministre Mme Khalida Toumi a cédé sa place à Mme Nadia Labidi en mai 2014. Cette dernière a hérité d’un secteur culturel qui se trouve aujourd’hui à la croisé des chemins : dominé par l’Etat, il n’arrive plus à répondre aux besoins des populations locales car il est trop verrouillé pour permettre aux citoyens de participer à la création, à la diffusion et à la distribution de leurs propres expressions culturelles et à y avoir accès.

Dans ce contexte, la nouvelle ministre de la Culture semble avoir pris conscience de cette réalité. Elle avait appelé, quelques jours après sa prise de fonction, à « l'implication de la société civile et du plus grand nombre d'artistes locaux, sans exclusion aucune dans l'élaboration des programmes culturels »[3]. Elle a estimé aussi qu’il était « tout à fait envisageable d’ouvrir le théâtre au secteur du privé »[4]. Nouveau, ce discours reconnait pour la première fois explicitement le rôle positif que peuvent jouer la société civile et le secteur privé dans le développement secteur culturel.

Après avoir subi 132 années de colonisation française appuyée par une politique culturelle coloniale façonnée au plus haut niveau de l’Etat[5], l’Algérie a œuvré, dès son indépendance en 1962, à retrouver et valoriser les fondements de son identité culturelle. Parmi les chantiers engagés, celui de la restructuration du secteur culturel revêtait un caractère particulièrement important.

Après une première période qui s’est étendue de 1962 à 1989 et pendant laquelle le secteur culturel a été géré selon le modèle socialiste, voire soviétique (l’Etat définissait, d’une façon exclusive, les moyens et les objectifs de la culture), le secteur culturel a été abandonné pendant la guerre civile, entre 1990 et 2000, après que l’Etat s’est désengagé du secteur. S’en est suivi la période allant de 2000 à nos jours, où l’Etat, reprenant des forces, est revenu plus fort que jamais pour instaurer une stratégie culturelle hégémonique. Cette stratégie lui a permis, en à peine 10 ans, de contrôler le secteur dans son ensemble pour devenir à la fois le seul régulateur et le seul entrepreneur. En effet, depuis l’élection du Président Abdelaziz Bouteflika pour un premier mandat en 1999, puis la nomination de l’ex ministre de la Culture Khalida Toumi en 2002, le secteur culturel a été profondément restructuré pour permettre à l’Etat d’exercer un contrôle sans commune mesure sur la culture en Algérie.

De seulement 64 millions de dollars en 2003, le budget de la culture est passé à 314 millions de dollars en 2014 (voir section 11). Cette évolution spectaculaire est due à la manne financière des rentes pétrolières et gazières dont le pays a bénéficié dès le début des années 2000. Pris dans son ensemble, le secteur culturel a bénéficié d’environ 2,8 milliards de dollars entre 2003 et 2014. Cette manne financière aidant, le ministère de la Culture, organisation publique de l’Etat en charge de la mise en œuvre de la stratégie du gouvernement en matière de culture, a engagé une entreprise forte de législation et de réglementation culturelle qui a indélébilement transformé le secteur culturel : de seulement 9 textes publiés en 2002, le nombre des textes législatifs et réglementaires est passé à 76 en 2012. Au total, plus de 548 textes fondamentaux relatifs au secteur culturel ont été publiés entre 2002 et 2012[6].

Après 12 ans passés à la tête du ministère de la Culture, l’ex ministre Mme Khalida Toumi a cédé sa place à Mme Nadia Labidi en mai 2014. Cette dernière a hérité d’un secteur culturel qui se trouve aujourd’hui à la croisé des chemins : dominé par l’Etat, il n’arrive plus à répondre aux besoins des populations locales car il est trop verrouillé pour permettre aux citoyens de participer à la création, à la diffusion et à la distribution de leurs propres expressions culturelles et à y avoir accès.

Dans ce contexte, la nouvelle ministre de la Culture semble avoir pris conscience de cette réalité. Elle avait appelé, quelques jours après sa prise de fonction, à « l'implication de la société civile et du plus grand nombre d'artistes locaux, sans exclusion aucune dans l'élaboration des programmes culturels »[7]. Elle a estimé aussi qu’il était « tout à fait envisageable d’ouvrir le théâtre au secteur du privé »[8]. Nouveau, ce discours reconnait pour la première fois explicitement le rôle positif que peuvent jouer la société civile et le secteur privé dans le développement secteur culturel.

Alors que seulement quelques études indépendantes qui s’intéressent à la structure du secteur culturel en Algérie ont été réalisées ces dix dernières années, très peu de statistiques et d’analyses « officielles » ont été publiées par les autorités en charge de culture. Ce manque d’information, jumelé à l’absence d’une politique culturelle nationale, a généré un flou qui caractérise aujourd’hui le secteur culturel dans son ensemble : qui fait quoi ? Quels sont les objectifs de la culture en Algérie ? Quels sont les moyens humains et financiers mobilisés ? Combien d’Algériens fréquentent-ils les théâtres, les cinémas, les musées ?...sont autant de questions qui restent sans réponses précises. Ce flou est d’autant plus injustifiable que le ministère de la Culture est doté de moyens financiers importants, qui lui permettent, s’il le souhaite, de réaliser des études et des analyses approfondies sur le secteur dans le but de traiter les lacunes observées.

Mais entretenir ce flou est aussi une manière d’éviter de « rendre compte » aux citoyens, notamment en matière de critères de sélection et de financement des projets culturels. La Cour des comptes, juridiction financière chargée principalement de contrôler la régularité des comptes publics, a épinglé, à maintes reprises, la gestion opaque de certains fonds, créés à travers des « comptes spéciaux » affectés surtout aux grandes manifestations culturelles[9]. Le ministère de la Culture puise dans ces comptes ainsi que dans son budget annuel définit dans la loi de finances pour financer les différentes institutions et activités sous sa tutelle. Et pour multiplier ces « comptes spéciaux », dans le but  d’augmenter indirectement son budget, le ministre de la Culture procéde, depuis quelques années, à la multiplication des manifestations culturelles d’ampleur. Ainsi, l’année de l’Algérie en France en 2003, Alger capitale de la culture Arabe en 2007, le Festival panafricain d’Alger en 2009, Tlemcen capitale de la culture islamique en 2011 et la célébration du cinquentenaire de l’indépendance en 2012, ont permis de maintenir le budget de la culture à un niveau élevé (voir section 3.8) pour financer notamment une centaine de festivals annuels institutionnalisés[10], extremement budgétivores.

A partir de 2007, année de l’organisation de la manifestation “Alger capitale de la culture Arabe”, le budget de la culture en Algérie a augmenté d’une façon spectaculaire. De seulement 38 millions de dollars en 2005, il a atteint son niveau historique de 561 millions de dollars en 2012, année qui a coïncidé avec la célébration du cinquantenaire de l’indépendance. En 2014, le budget de la culture a atteint 314 millions de dollars, dont 16% sont destinés à l’organisation de la manifestation Constantine capitale de la culture arabe 2015. Pour la première fois, un budget pour une grande manifestation a été directement intégré au budget du ministère et non pas, comme auparavant, versé dans un « compte spécial ».

Ce que l’on peut lire comme une stratégie pour maintenir à tout prix le budget du ministère de la Culture à un haut niveau n’est pas viable sur le long terme, car en cas d’abscence d’évenement d’ampleur, le budget consacré à la culture sera réduit en conséquence. De là l’importance de négocier, avec le gouvernement, que le taux fixe de 1% du budget de l’Etat soit dédié exclusivement à la culture, quelle que soit la conjoncture. En 2014, le budget de la culture en Algérie représente  0,5% du budget de l’Etat.


Footnotes

  1. ^ Risler C., 2004, La politique culturelle de la France en Algérie, Ed. L’Harmattan, Paris.
  2. ^ Kessab A., 2014, Législation et réglementation culturelle en Algérie, Ed. El Mawred El Thaqafy, Le Caire.
  3. ^ Site du ministère de la Culture. Dernière consultation le 20.01.2015 : http://www.m-culture.gov.dz/mc2/fr/lireact.php?id=101
  4. ^ Quotidien El Watan, “Vers une Ansej de la culture”, par W. Bouchakour, 23.07.2014.
  5. ^ Risler C., 2004, La politique culturelle de la France en Algérie, Ed. L’Harmattan, Paris.
  6. ^ Kessab A., 2014, Législation et réglementation culturelle en Algérie, Ed. El Mawred El Thaqafy, Le Caire.
  7. ^ Site du ministère de la Culture. Dernière consultation le 20.01.2015 : http://www.m-culture.gov.dz/mc2/fr/lireact.php?id=101
  8. ^ Quotidien El Watan, “Vers une Ansej de la culture”, par W. Bouchakour, 23.07.2014.
  9. ^ « Fonds spéciaux : des milliards détournés ou mal gérés ».  Site TSA (Tout sur l’Algérie), 09.11.2014. Dernière consultation le 20.01.2015. http://www.tsa-algerie.com/2014/11/09/tsa-sest-procure-le-rapport-de-la-...
  10. ^ Gérés initialement par des associations, le ministère décide par décret de les financer à 100%. En contrepartie, le ministère les met sous sa tutelle. Il nomme le commissaire du festival et participe à l’orientation esthétique et politique de l’évènement.